Ce projet est né de la rencontre de la compagnie « Vivre dans le feu » avec les enseignants de Lettres, Histoire et Education musicale du collège Lucie Aubrac de Morvillars, dans la cadre du dispositif « Cultures Collèges ».
Pensé sur le modèle des randonnées spectacles créées par la compagnie, le travail engagé par Louise Lévêque, metteure en scène et Marthe Alexandre, chanteuse lyrique a conduit les élèves à découvrir et mettre en voix une nouvelle de Maupassant, Le père Milon, décrivant un épisode de la guerre de 1870. Composé de deux volets, il a permis dans un premier temps aux élèves de parcourir les différentes étapes de création d’un spectacle théâtral et musical jusqu’à sa présentation à un public d’élèves, de parents, de professeurs. Le second volet fut consacré à un temps fort avec la présentation de SAUVAGE(s) randonnée spectacle de la Cie Vivre dans le feu.
Les thématiques abordées furent la littérature, la guerre, le chant comme expression de l’indicible ; les notions d’héroïsme, de violence et de patriotisme sont étudiées à travers le portrait du Père Milon, de Maupassant.
23 élèves d’une classe de 4ème se sont prêtés à cette belle expérience.
Inscrit dans le cadre d’un travail pluridisciplinaire, ce projet a permis d’étudier en Lettres les nouvelles réalistes, en particulier à travers Maupassant ; en éducation musicale, le romantisme fut exploré et les élèves ont appris à mettre en musique, sonoriser un texte ; dans ces deux disciplines, les élèves ont appréhendé l’expression des sentiments. En histoire-géographie, la guerre de 1870 fut considérée par le prisme de l’histoire locale.
Afin de rendre plus concrets les événements qui ont marqué la fin du XIXème siècle, une visite de la Citadelle et du musée d’Histoire de Belfort ainsi qu’une découverte de documents authentiques aux Archives départementales du Territoire de Belfort ont constitué une étape importante dans la réalisation de ce projet.
De nombreux domaines du socle de compétences furent sollicités en complément des 3 piliers de l’Education Artistique et Culturelle.
Durant la semaine du 7 au 11 février 2022, les élèves ont élaboré, en ateliers, de manière intensive, la mise en voix de la nouvelle de Maupassant. Un découpage et une distribution initiale du texte avait été en amont proposée par Louise Lévêque, qui leur avait également demandé de réfléchir à un environnement musical et à une mise en scène.
Dans un premier temps, de nombreux conseils techniques ont été prodigués, tout en les faisant répéter, pour les aider dans l’apprentissage ; la metteure en scène a insisté sur l’importance des césures pour donner à entendre le texte et ralentir le débit. Marthe Alexandre leur a transmis des techniques de souffle pour le chant. Une réflexion sur le choix des costumes a débuté dès les premières répétitions.
La seconde journée a débuté par une « italienne » de ce que deviendra le spectacle. Les élèves ont déjà impressionné par la maitrise de leur texte, presque sans aucune hésitation. Cela a permis de commencer rapidement la mise en scène et la mise en voix des chants rythmant le texte.
Après des essais en salle, élèves et intervenantes sont sortis du collège pour adapter le spectacle à l’extérieur et penser les mouvements de la randonnée spectacle. Exercice encore différent pour les élèves qui ont dû rester concentrés, malgré les difficultés liées aux bruits extérieurs et aux accessoires à déplacer.
La mise en scène fut terminée au cours de la troisième journée. Pour s’adapter à diverses contraintes, l’espace de jeu a été modifié, les élèves s’y sont adaptés aussitôt. A la fin de la journée, en marge d’un travail de fond, individuel, les déplacements et les images collectives du spectacle sont finalisées.
« Le Déserteur » de Boris Vian, chant final, a permis d’engager une réflexion sur les enjeux du texte, du témoignage de guerre et des passions humaines.
Après un grand travail technique, les élèves se sont investis dans la parole artistique.
La dernière journée est consacrée à un travail de précision pour l’interprétation des chants ; ils s’échauffent pour leur grande première et sont déjà totalement à l’écoute les uns et des autres ; d’énormes progrès ont été réalisés par chacun d’entre eux.
Les voix chantées et parlées sont plus amples et claires. Chacun travaille sa partie de texte jusqu’à la dernière minute en précisant ses choix d’interprétation.
Quelques heures plus tard, les élèves se sont produits devant une centaine de personnes. Les élèves ont réagi parfaitement en étant concentrés et en sachant adapter la mise en scène à la réalité de la représentation.
En dépit de très chaleureux applaudissements, ils ont dû rester vigilants et concentrés pour la deuxième représentation. Il est compliqué, pour eux, de réaliser que tout est à refaire, que le succès de la première ne garantit pas le succès de la seconde. Ils sont parvenus à rester précis et engagés jusqu’au bout de cette deuxième représentation, plus difficile.
Ils ont époustouflé le public de collégiens, de professeurs et de parents et l’ont particulièrement ému à l’occasion de leur magnifique final en interprétant le Déserteur de Boris Vian.
Nous avons découvert à cette occasion, une classe de 23 élèves enthousiastes, passionnés, engagés. La cohésion, l’écoute et l’entraide au sein de la classe s’en sont trouvées renforcées. Des progrès remarquables ont été constatés quant à la maitrise de l’oral et donné confiance à de nombreux élèves. Certains se sont révélés et ont affiché de réelles prédispositions pour le jeu théâtral et le chant.
Cette belle expérience a connu un ultime temps fort en juin, lorsque les élèves ont découvert la randonnée spectacle, « Sauvage(s) » : composée de deux nouvelles de Maupassant, Mademoiselle Fifi et La Mère Sauvage, sur des extraits de Ravel, Purcell, Debussy, ou encore Offenbach… interprétée par Maruska Le Moing, chanteuse lyrique et comédienne. Les élèves ont ainsi assisté à un spectacle professionnel, mettant en perspective les enjeux du travail de création artistique.
Note d’intention de Louise Lévêque, metteur en scène :
« Les élèves sont amenés à faire l’expérience de la littérature en extérieur, le temps d’une randonnée rythmée par le souffle de l’auteur et des personnages. Grace au mouvement, le spectacle offre au public adolescent d’être partie prenante de l’action. Ainsi une écoute différente de celle de la salle de classe peut se révéler inédite et stimulante pour les élèves quel que soit leur niveau et leur appétence pour la lecture. L’imaginaire est stimulé par l’action physique et par la proximité de la comédienne/chanteuse lyrique. La musique nous autorise à exprimer l’indicible de la perte, de la peur. »
Invités à faire découvrir à Maruska Le Moing un extrait de leur propre adaptation d’une nouvelle de Maupassant, les élèves se sont prêtés une nouvelle fois au jeu théâtral, en présence de Mme Marianne Tanzi, Directrice Académique, et de Gérard Oustric, référent culturel.
Sandrine BOZZOLI – Sophie GRIMONT
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